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L.M. 1989-90, c. 1

Projet de loi 28, 2e session, 34e législature

Loi sur la création et la validation de la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les autochtones

Table des matières

Sanctionnée le 14 juin 1989)

ATTENDU QUE les autochtones constituent une partie estimée et intégrante de la collectivité manitobaine;

ATTENDU QUE la province du Manitoba s'est engagée à assurer une administration juste et équitable de la justice pour tous les Manitobains, ainsi que le garantit la Charte canadienne des droits et libertés;

ATTENDU QUE les problèmes et les préoccupations des autochtones en ce qui concerne l'administration de la justice au Manitoba sont uniques;

ATTENDU QUE ces problèmes et ces préoccupations peuvent être attribuables à de nombreuses raisons, notamment les différences culturelles qui existent entre les autochtones et la structure sociale et judiciaire établie, l'existence de nombreuses collectivités autochtones dans des endroits éloignés et isolés du Manitoba, la séparation des responsabilités constitutionnelles des gouvernements provincial et fédéral envers les autochtones, la sur-représentation des autochtones dans des conflits relevant du droit criminel et la sous-représentation des autochtones dans le domaine de l'administration de la justice;

ATTENDU QUE les chefs des autochtones au Manitoba s'inquiètent de plus en plus des rapports entre l'administration de la justice au Manitoba et les aspirations légitimes des autochtones à s'autogouverner;

ATTENDU QUE des événements récents, notamment le décès de J.J. Harper et la cause de Helen Betty Osborne, ont soulevé d'autres inquiétudes en ce qui concerne la discrimination systématique à l'endroit des autochtones dans l'administration de la justice au Manitoba;

ATTENDU QUE le lieutenant-gouverneur en conseil a nommé, au moyen du décret no 468/88 daté du 13 avril 1988 et en vertu de l'article 4 de la Loi sur le procureur général, la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les autochtones;

ATTENDU QUE le lieutenant-gouverneur en conseil a créé et prorogé, au moyen du décret n0 1308/88 daté du 2 novembre 1988 et en vertu de la partie V de la Loi sur la preuve au Manitoba, la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les autochtones et a révoqué le décret n0 468/88;

ATTENDU QU'il est jugé opportun de valider la création et la prorogation de la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les autochtones ainsi que les actes qu'elle a accomplis depuis le 13 avril 1988;

PAR CONSÉQUENT, SA MAJESTÉ, sur l'avis et du consentement de l'Assemblée législative du Manitoba, édicte :

Définition

1

Pour l'application de la présente loi, le terme « Commission » s'entend de la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les autochtones créée en vertu du paragraphe 2(1).

Création de la Commission

2(1)

Est par les présentes créée la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les autochtones.

Nomination des membres

2(2)

La Commission est composée de Monsieur le juge en chef adjoint A.C. Hamilton de la Cour du Banc de la Reine du Manitoba et de Monsieur le juge en chef adjoint C.M. Sinclair de la Cour provinciale du Manitoba.

Étendue de l'enquête

3(1)

Les commissaires enquêtent, établissent un rapport et font des recommandations au ministre de la Justice sur les relations entre l'administration de la justice et les autochtones du Manitoba, en se laissant notamment guider par le mandat figurant à l'annexe.

Remise du rapport au ministre

3(2)

La Commission remet son rapport au ministre de la Justice au plus tard le 31 mars 1990 ou à une date ultérieure fixée par le lieutenant-gouverneur en conseil.

Pouvoirs

4

Sans préjudice des pouvoirs qui leur sont conférés en vertu de la présente loi, les commissaires peuvent :

a) adopter les règles de procédure qu'ils estiment nécessaires ou indiquées relativement à la tenue de l'enquête, notamment en ce qui concerne l'exclusion du public ou d'un membre du public des audiences;

b) tenir des audiences publiques aux lieux et aux moments qu'ils estiment indiqués;

c) retenir les services des avocats et des enquêteurs dont ils estiment la présence nécessaire ou souhaitable pour faciliter l'enquête.

Accès aux registres

5

Les commissaires, ou les personnes qu'ils désignent, sont par les présentes autorisés à avoir un accès illimité auprès du personnel des ministères et des organismes du gouvernement du Manitoba et aux documents, pièces justificatives, registres et livres pertinents de toutes sortes qui se trouvent en la possession de ces ministères et de ces organismes.

Frais

6

Le ministre des Finances paie sur le Trésor les frais de déplacement et autres frais engagés pour la tenue de l'enquête ainsi que les honoraires et les salaires des conseillers et des assistants dont les services sont retenus pour les besoins de la Commission, après leur attestation par le greffier du Conseil exécutif, à moins que le lieutenant-gouverneur en conseil ne prenne d'autres mesures à ce sujet.

Pouvoirs de la Commission

7

Sans préjudice des pouvoirs qui lui sont accordés, la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les autochtones :

a) est déclarée avoir le droit d'enquêter sur tous les aspects des événements qui ont précédé le décès de J.J. Harper, sur l'enquête que le Service de police de la Ville de Winnipeg a tenue après le décès de J.J. Harper, sur les déclarations que les représentants du Service de police ont faites et sur la justesse de ces déclarations, sur la formation et les règlements du Service de police de la Ville de Winnipeg en ce qui concerne l'interpellation de personnes dans la rue, l'arrestation de personnes, l'utilisation et la protection d'armes à feu et la façon de traiter les autochtones, sur la question de savoir s'il existe des preuves de préjugé racial à l'égard des événements qui ont conduit au décès de J.J. Harper ou de l'enquête qui l'a suivi, sur le caractère adéquat des procédures d'enquête au sujet du décès de personnes qui sont décédées pendant qu'elles étaient en contact avec la police et sur toutes les questions à propos desquelles des preuves ont été produites et qui ont donné lieu à des conclusions au moment où l'enquête médico-légale sur le décès de J.J. Harper a été tenue en vertu des dispositions de la Loi sur les enquêtes médico-légales;

b) est déclarée avoir le droit d'enquêter sur tous les aspects de l'enquête de la police sur le décès de Helen Betty Osborne et sur tous les aspects concernant le dépôt des accusations qui en ont résulté et leur poursuite, y compris la question de savoir si les personnes qui devaient être accusées l'ont été, si les accusations appropriées ont été déposées, si des accusations auraient dû être déposées plus tôt, si une immunité à l'égard de poursuites aurait dû être accordée à Lee Colgan, s'il existe des preuves de préjugé racial à l'égard des événements qui ont conduit au décès de Helen Betty Osborne ou de l'enquête qui l'a suivi, si les actes ou les omissions de personnes ne relevant pas du Service de police ont nui à l'enquête et si la poursuite s'est déroulée de manière régulière;

c) est déclarée avoir le droit à la fin de l'enquête et au moment de l'établissement de son rapport de tirer les conclusions de fait qu'elle estime appropriées et, lorsqu'elle l'estime indiqué, de révéler les noms des personnes dont la conduite devrait, à son avis, être mise en question;

d) peut tenir des audiences spéciales afin de contraindre des personnes à produire des documents qui ont, à son avis, directement ou indirectement trait aux questions dont elle est saisie ou à la crédibilité d'une personne.

Validation des actes de la Commission

8

Les ordonnances, les décisions, les actes de procédure judiciaire, les délibérations, les actes et les dépenses de la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les autochtones qui sont antérieurs à la date de sanction de la présente loi sont par les présentes déclarés valides comme s'ils avaient été rendus, avaient été pris, avaient été délivrés, avaient eu lieu, avaient été accomplis et avaient été engagés en vertu de la présente loi et ils ne peuvent être contestés devant un tribunal judiciaire.

Partie V du c. E150 de la C.P.L.M.

9(1)

Sous réserve du paragraphe (2), la partie V de la Loi sur la preuve au Manitoba ne s'applique pas à la présente loi.

Application de certaines dispositions

9(2)

Le paragraphe 83(4), les articles 84, 87, 88, 89, 90, 91, 92, 93 et 94 ainsi que les paragraphes 95(1), (2) et (4) de la partie V de la Loi sur la preuve au Manitoba s'appliquent à la présente loi, compte tenu des adaptations de circonstance.

Incompatibilité

10

Les dispositions de la présente loi l'emportent sur les dispositions incompatibles de toute autre loi de l'Assemblée législative.

Pouvoirs du lieutenant-gouverneur en conseil

11

Le lieutenant-gouverneur en conseil peut :

a) mettre fin aux activités de la Commission;

b) nommer les membres de la Commission et révoquer leur nomination;

c) modifier, accroître ou clarifier l'étendue de l'enquête de la Commission;

d) prendre des mesures au sujet du paiement des frais de déplacement et autres frais engagés pour la tenue de l'enquête ainsi qu'au sujet du paiement des honoraires et des salaires des conseillers et des assistants dont les services sont retenus pour les besoins de la Commission;

e) fixer une date ultérieure pour la remise du rapport de la Commission au ministre de la Justice;

f) prendre des mesures concernant les questions à l'égard desquelles la présente loi ne contient aucune disposition adéquate.

Entrée en vigueur

12

La présente loi a un effet rétroactif et est réputée être entrée en vigueur le 13 avril 1988.

ANNEXE

MANDAT

But de la Commission

La Commission a pour but d'enquêter et de tirer des conclusions sur la situation des autochtones relativement au système judiciaire au Manitoba et de produire à l'intention du ministre de la Justice un rapport final faisant état de conclusions, de solutions et de recommandations.

La Commission doit entre autres étudier tous les aspects des affaires concernant J.J. Harper et Helen Betty Osborne et peut faire les recommandations supplémentaires qu'elle juge appropriées relativement à ces affaires.  Elle peut notamment recommander une nouvelle étude de certaines questions ou une nouvelle enquête sur des aspects des deux affaires.

Étendue de l'enquête

L'enquête doit porter sur toutes les composantes du système judiciaire, c'est-à-dire la police, les tribunaux et les services correctionnels.  La Commission doit déterminer s'il existe des différences dans le traitement que le système judiciaire réserve aux autochtones et aux non-autochtones et, le cas échéant, l'étendue de ces différences.  Elle doit également déterminer s'il existe, dans le système judiciaire, des pratiques particulières ayant des effets nuisibles, y compris des mesures discriminatoires systématiques à l'endroit des autochtones.  La Commission doit se pencher sur le fonctionnement actuel du système judiciaire et déterminer s'il existe d'autres méthodes de traiter les autochtones ayant des démêlés avec la justice.  Ainsi, la Commission pourra examiner les points qui suivent.

Police :

- les questions de forces policières relativement aux autochtones;

- le déploiement du personnel et l'accessibilité des services policiers;

- les procédures d'arrestation et d'accusation;

- la sensibilisation culturelle des policiers et les programmes de promotion sociale;

- la formation des agents de protection de la faune et leur conduite envers les autochtones.

Accessibilité et pertinence des services juridiques :

- l'admissibilité et accès à l'aide juridique;

- l'accès dans les collectivités éloignées.

Procédures des tribunaux :

- le recours à la mise en liberté sous caution et à la détention;

- la discrétion de la poursuite et négociation de plaidoyer;

- le rôle des communicateurs judiciaires;

- les effets des délais entre l'arrestation et le procès;

- les procédures familiales;

- le tribunal pour adolescents;

- les procédures en matière de bien-être des enfants.

Décisions des tribunaux :

- la comparaison des décisions rendues à l'égard d'autochtones et de non-autochtones;

- le recours aux sentences d'emprisonnement;

- la possibilité d'autres sentences.

Situations postsentencielles :

- le succès relatif des groupes autochtones et non-autochtones en probation;

- la disponibilité et l'utilisation du programme de travail communautaire;

- les incarcérations antérieures : absences temporaires, libération conditionnelle, etc.

- le recours aux maisons de transition;

- la réinsertion dans les collectivités et les réserves.

Autres :

- la connaissance que les autochtones ont du système judiciaire;

- la communication entre le personnel du système judiciaire et les autochtones;

- l'emploi d'autochtones dans le système judiciaire.